par Marane
Rappelons que c’est une théorie adoptée par l’Église, au 4ème siècle à la suite des travaux théologiques d’Augustin d’Hippone, théorie qu’elle a ensuite transformé en dogme.
Pourtant, il n’y a dans l’Évangile aucune trace de la notion de péché originel. À aucun moment Jésus ne parle de cela. Ce n’est pas dans la culture juive. Pour les juifs, le seul vrai péché c’est de s’éloigner de Dieu.
Le péché originel est une doctrine de la théologie catholique. On ne la retrouve ni dans l’orthodoxie, ni dans le judaïsme, ni dans l’islam.
L’Église qui se constitue au 4ème siècle doit choisir entre différentes théories qui s’affrontent. C’est ainsi qu’a été retenu la théorie d’Augustin d’Hippone, pour des raisons trop longues à expliciter ici. Celui-ci, ancien manichéen (1), se bat contre la théorie de Pélage qui considérait que la création était bonne. Il s’appuie sur Origène qui partage la vision pessimiste de Paul de Tarse sur l’homme. L’influence de Paul a été prépondérante dans sa conversion au christianisme.
Augustin se pose la question du mal et de la mort, pourquoi existent-ils ? Il trouve une réponse à ses questions dans le passage, V,12 de l’épitre aux Romains :
« C’est pourquoi, comme par un seul homme, le péché est entré dans le monde, et par le péché la mort, et qu’ainsi la mort s’est étendue sur tous les hommes, parce que tous ont péché… »
Paul parle de la faute d’Adam qui permet à la mort d’entrer dans le monde. Cependant il ne dogmatise pas un péché originel qui se transmettrait à partir de la faute d’Adam.
Augustin qui s’en tient à la seule lecture de la version de Paul, ne se réfère pas au texte de la Genèse proprement dite (Bereshit). Dans ce passage, il n’est pas question de péché (hattat, faute en hébreu).
Ce terme apparaît dans un autre passage en Genèse IV, 7, dans le dialogue entre Caïn et Dieu. Ce n’est pas une faute imposée et héréditaire, mais un choix éthique, fondateur d’un libre arbitre. Les exégètes estiment qu’il est plus exact de traduire le mot hébreu hattat par erreur ou méprise. Le judaïsme demande seulement à l’homme de tirer la leçon de ses erreurs.
Non seulement Augustin tient pour vraie la version de Paul et ne vérifie pas ses sources, mais il commet une autre erreur, due à sa méconnaissance du grec. Il consulte une Bible mal traduite en latin et pour expliquer que ce péché se transmet, selon la traduction erronée de cette bible appelée vieille latine, il qualifia ce péché d’originel.
Ce péché, affirma-t-il, se transmet à tous les hommes, par engendrement, comme une souillure héréditaire ; il l’assimila au péché de chair, suivant en cela le discrédit de la sexualité mis en œuvre par le stoïcisme et le manichéisme.
Cette interprétation est en contradiction avec la lettre du texte de la Genèse, qui parle du fruit défendu comme étant celui de la connaissance du bien et du mal, expression qui signifie que l’homme se sépare du reste du règne animal par la conscience. Cette assimilation du péché originel à un quelconque péché de chair sera d’ailleurs combattue par nombre de théologiens comme une erreur populaire, au même titre que l’assimilation du fruit à une pomme.
Mais le mal est fait, tout cela va être codé par l’Église catholique dans son catéchisme. La faute d’Adam est ainsi décrite : « L’homme, tenté par le diable, a laissé mourir dans son cœur la confiance envers son créateur (cf. Gn 3, 1-11) et, en abusant de sa liberté, a désobéi au commandement de Dieu. »
Les conséquences sont :
« Par son péché, Adam, en tant que premier homme, a perdu la sainteté et la justice originelles qu’il avait reçues de Dieu non seulement pour lui, mais pour tous les humains. À leur descendance, Adam et Ève ont transmis la nature humaine blessée par leur premier péché, donc privée de la sainteté et la justice originelles. Cette privation est appelée péché originel. » (extrait du catéchisme catholique)
Dans leur quasi totalité les théologiens actuels (de pays francophones) ne croient pas à la réalité historique du péché des origines. Ils ne croient pas qu’Adam et Ève, à un moment précis du temps, ont succombé à la tentation de Satan et ont commis une faute grave de désobéissance par orgueil. Ils ne croient pas non plus que, depuis cette faute et en conséquence de celle-ci, tous les hommes naissent avec une nature blessée, et sont enclins au mal.
(1) Pour le manichéisme, le corps de l’homme est mauvais et le célibat est prôné.
Commentaires