par Sédir
Les visions de Pathmos doivent être considérées comme excellemment chrétiennes. Tout être humain chez lequel les rapports avec l’Invisible sont conscients assiste à des scènes de l’Au-Delà ; mais l’intérêt, la qualité, l’opportunité de ces scènes, leur vérité, c’est-à-dire leur coïncidence avec l’équilibre mental du visionnaire et les besoins normaux du public, varient depuis l’extrême sottise jusqu’au plus admirable génie, depuis la plus basse perversité jusqu’à la bonté parfaite.
Toute vision obtenue par un procédé humain porte en soi un germe impur et ne doit être examiné qu’avec l’esprit critique le plus aigu. Telles furent les révélations des initiateurs religieux autres que le Christ. Ces hommes, quelque gigantesques qu’ils se dressent devant nous, ne sont tout de même que des hommes ; qu’ils aient été les constructeurs de leurs pouvoirs étonnants, ou qu’ils les aient reçus de quelque formidable gouverneur cosmique, ils ne sont pas sortis du Créé, du Relatif, donc de l’Imparfait, du Reflet, de la Réfraction. Voilà le vice natif des Ésotérismes sans exception.
Le Christ étant le Créateur, le Parfait, le Réel, le Verbe, donne seul à ses disciples, selon leur capacité réceptive, la Vérité, en tout ordre. Les mythologies, les poèmes sacrés sont l’histoire naturelle de la moitié invisible de chaque sphère religieuse ; pris en bloc, ils forment la géographie d’une partie de l’Invisible relatif ou naturel ; tandis que quelques passages de l’Évangile avec l’Apocalypse nous donne un aperçu de l’Invisible surnaturel ou éternel. Ce que je vais vous dire ne sera donc pas de l’Occultisme, mais bien du Christianisme dans un de ses aspects peu étudiés, parce que pas très nécessaire à connaître. C’est la description d’un petit coin du Royaume des Cieux ; accordons-nous de satisfaire notre curiosité enfantine ; nous y trouverons peut-être un peu de courage et un peu d’amour.
Le Père ne peut être vu par personne ; les habitants du Ciel eux-mêmes n’osent que se prosterner devant lui. Le Fils se laisse apercevoir quoique bien souvent sous un seul de ses innombrables aspects, ou de plus loin encore, sous une de ses images. L’Esprit enfin n’est perçu que par ses effets, tellement il est subtil.
Les Quatre Vivants sont ces anges insignes de qui les prolongements jusqu’à la matière ont formé les éléments des anciens : le Sphinx, les points cardinaux, les roues d’Ézéchiel, les racines des Évangélistes, tous les quaternaires. L’apôtre ne dit rien de leurs fonctions ; elles sont très simples cependant ; c’est parce qu’elles sont évidentes qu’on ne les voit pas.
Les vingt-quatre vieillards sont les délimitateurs, ceux qui placent les bornes de la création dans les six directions de l’Étendue et les quatre formes de la Durée ; les anciens ont établi leur zodiaque et toute leur astrologie et tous leurs systèmes graphiques ou hiéroglyphiques d’après l’ombre de ces Ministres (1)
Quant aux nombres sept et douze, que l’on rencontre, multipliés ou divisés, à chaque page de l’Apocalypse, ils représentent des lois de la Vie, comme pour nos ingénieurs une équation représente tout une machine ; nous n’avons pas à en connaître la raison.
Le Christ considéré comme potentat est le Lion qui ouvre le livre du Père, sur lequel, seul, il a le droit d’écrire. Il est l’Alpha parce que le premier créé, la première pensée, le premier projet du Créateur ; après lui naissent les milliards de créatures ; comme il doit les sauver, il lui faut attendre qu’elles soient toutes venues à l’existence, pour naître à son tour ; comme sa rédemption est universelle ; il lui faut parcourir les mondes sans arrêt. Sa stature de Rédempteur ne sera parfaite qu’à la fin des temps ; il sera ainsi l’Omega, il cessera d’être l’Agneau sacrifié pour redevenir le Lion triomphant.
Le livre aux sept sceaux est celui du Jugement où sont inscrits les noms et les actes de tous les êtres ; chaque monde a le sien ; seul, le Fils peut l’ouvrir, car seul il est la victime innocente, et seul, il ouvre aux êtres le vrai chemin et la force.
Contrairement à l’opinion des trois ou quatre cents docteurs qui l’ont commentée, l’Apocalypse ne décrit pas le seul Jugement dernier, mais bien toutes les formes possibles de jugements passés, présents ou futurs. Toute planète, en effet, visible ou invisible, naît, vit et meurt ; avant de disparaître, soit en se dissolvant dans l’espace, soit en s’agrégeant à une autre planète, elle subit un jugement, c’est-à-dire que son Seigneur, après avoir examiné son travail, lui signifie une destination ultérieure. En outre, l’existence d’une planète est soumise à une loi de série ; chacune de ses périodes se termine par un jugement partiel ; pour la Terre, chacune des « années platoniques » de son existence (24 à 26 000 ans) et chacune des quatre « saisons platoniques » (environ 6 000 ans) se terminent par des jugements partiels, particuliers à la race, à la flore, à la faune qui ont évolué principalement au cours de cette saison ou de cette année. Le déluge de Noé a eu lieu environ 4 000 ans avant J.C. ; nous pouvons donc, conformément aux prophéties connues, nous croire proches d’un nouveau jugement. Toutefois, souvenons-nous de l’Évangile.
Bulletin des Amitiés Spirituelles, février 1920 (extrait).
(1) Sédir évoque aussi la similitude des 24 vieillards et des 24 signes du véritable zodiaque dont les clefs ont été oubliées. Le zodiaque des 12 n’est pas complet.
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