par Amo
Mais disons quelques mots de plus.
Cette Loi maintient ou aspire tous les êtres dans l’Unité, car elle favorise tout rapprochement de l’harmonie universelle, tout acte d’Amour universel, et punit l’Égoïsme, l’Individualisme dont l’extrême limite est l’anéantissement (dont le minéral offre l’image temporaire).
Car c’est un fait ; les égoïstes sont tristes, glacials ; les hommes dévoués sont heureux, gais, expansifs, réchauffants pour tous, dans la limite, bien entendu, que tolère la misère générale qui règne sur la terre.
Cette Loi qui enchaîne toutes les existences à l’Existence unique fait participer tous les Êtres à la Vie Universelle et n’en saurait oublier aucun. L’homme abuse malheureusement de sa liberté pour ne pas entendre les avertissements providentiels. Il se trame des existences malheureuses que rien ne peut lui faire éviter, et retarder sa Libération.
Mais il y a mieux encore. Le Temps et l’Espace sont les conditions auxquelles sont soumis les individus ; ces conditions sont relatives à notre état de conscience.
À mesure que celle-ci évolue, les conditions de temps et d’espace se transforment. Le Voile devient moins opaque, moins lourd, l’Illusion moins fascinante.
Le Passé, le Présent, l’Avenir s’enchaînent si étroitement, s’identifient tellement, qu’ils se confondent presque en une chose unique.
La conscience évoluée contemple enfin le Tableau Éternel, le Miroir de l’Unité, la Démonstration divine du Beau et du Vrai ; mais elle n’est plus assujettie aux conditions de l’Espace et du Temps. Elle est rentrée dans ce qui est partout et toujours le même et contient tout.
Elle contemple ce tableau, mais elle est identifiée dans l’Un fixe, dans l’Homogène pur ; elle ne confond plus la vague éphémère avec l’éternel Océan.
Cette Unité Divine (Dieu) n’est jamais assujettie au monde, à la Manifestation, qui repose entièrement sur les opposés (apparences) : lumière, ténèbres ; bien, mal ; plaisir, douleur ; bonheur, malheur, etc.
Ainsi nous ne sommes pas panthéistes dans le sens habituel du mot.
Nous disons qu’il y a l’Univers, la vie éternelle de l’Univers, la communion de tous les êtres visibles et invisibles, inférieurs ou déifiés ; au-dessus, l’Unité divine introublée, c’est le Dieu des chrétiens, l’Omniscient. L’Univers est une ombre tirée de l’Essence pure ; mais ces choses ne tombent pas dans l’Intellect. Ce n’est que par la Spiritualisation qu’on les peut mieux comprendre ou sentir.
Nous n’avons pas atteint ici le point culminant ; je le répète, notre intelligence actuelle, qui n’est que de l’intellect, ne saurait concevoir ce qui est au-dessus, l’Absolu.
Au-dessus même de toute conception de toute intelligence, l’Absolu, l’Inconnaissable, l’Au-delà de Tout, Aïnsoph des kabbalistes, Parabrahm ou Paramatma des Maîtres indous.
Ce que je désire surtout, c’est persuader les lecteurs de la Paix Universelle, au sujet de l’Essentialité des deux notions principes : Unité, Causalité, qui se rapportent respectivement à Amour, Raison et Religion, Science et en Socialisme à Solidarité ou Fraternité et Justice sociale. Il n’y a pas d’antagonisme nécessaire entre ces deux aspects, choses distinctes ; il faut les harmoniser. L’une par l’autre elles se complètent, se prouvent, se vivifient. La vibration manifeste le point vibrant, le centre des vibrations, centre des ondes sonores qui sont le Monde.
Sans le centre de vibration d’autre part, point d’ondes sonores.
Sans l’Unité, pas de Loi : sans la Loi pas d’Unité dans l’Univers.
L’Enfer éternel est une monstruosité qui ne répond ni à l’Amour ni à la Raison.
Dieu crée le monde ; il y a peu d’élus, dit l’Église : donc c’est le Diable qui récolte tout !... Quel manque de prévoyance divine, et comme il eût mieux valu que Dieu continuât à ne rien faire !
Fort heureusement, il ne s’agit ici que de critiquer une conception humaine digne d’autres temps.
À nos savants, à nos philosophes, l’Inde offre ses trésors ; ils n’ont garde d’y fouiller. Si le géologue proclame l’antiquité de la terre, le monde officiel ne remonte pas au-delà de six mille ans ; les gigantesques civilisations qui précédèrent leur sont inconnues.
S’agit-il de la conception suprême des Bouddhistes, le Nirvâna ? Au même instant, tous nos docteurs en Israël vous servent le vieux cliché : Nirvâna, c’est l’anéantissement.
’accuse ceux qui disent cela d’être des menteurs volontaires, ou d’inconscients automates.
Une bonne fois pour toutes, consultez les intéressés, les Bouddhistes (les négations de quelques sectes dissidentes ne peuvent supprimer l’affirmation générale ; ils vous répondront : Nirvâna est l’entrée consciente dans l’Omniscience ; c’est une notion de Plénitude analogue à celle du Paradis des Chrétiens, mais supérieurement développées. (Le Paradis des Chrétiens n’est que le Dévachan incompris, situation de repos bienheureux dans laquelle l’âme, fatiguée par une vie terrestre, se repose après la mort, entre deux incarnations ou périodes d’action). On n’entre en Nirvâna qu’après une Divination, résultat d’innombrables existences et d’efforts vers la Vérité, qui transforment la Conscience en l’universalisant.
Il n’y a pas deux natures humaines. On aime en Chine comme on aime en France. On rit ou l’on pleure là-bas comme ici, autrefois comme aujourd’hui ; et dans nul pays, dans nulle époque un homme ne saurait s’extasier, s’illuminer par la contemplation du Néant. S’il y a des saints bouddhistes par exemple, saints par la Bonté, saints par le Divin qui rayonne à travers eux, c’est qu’ils ont regardé autre chose que la Nuit sombre du Rien, c’est qu’ils ont une autre espérance que celle de la mort absolue dans le sens d’anéantissement, de perte du fruit des efforts accomplis, des souffrances endurées.
Devant cette véritable ignorance des savants, des prêtres, chacun cherche donc en lui-même, qu’il ait le culte du Réel, qu’il soit un Réeliste. Je lui promets l’acquisition rapide de la clairvoyance et du jugement. À ses yeux l’Harmonie remplacera les contradictions désespérantes.
Unité, Causalité sont les deux colonnes sur lesquelles vous pouvez édifier, qui donneront à votre cœur le Pain d’Amour, à votre Pensée celui de l’Intelligence pénétrante.
Toute larme versée veut rétribution ; tout désir appelle sa réalisation. Veillez donc sur vos Désirs, chassez les images impures de votre imagination, les pensées perverses qui, par vous cultivées, deviendraient un jour les actes pervers dont vous répondrez pour vous-mêmes et ceux qu’ils auront séduits, corrompus.
Le Désir d’Idéal, surtout, s’il ne correspondait pas à une Réalité, serait la plus affreuse duperie.
En vous donc que le silence complet à tout parti pris s’établisse ! (Pour entendre la mélodie, il faut faire silence, qu’il s’agisse d’une musique de salon ou de celle divine de l’Univers) ; n’ayez qu’un culte, celui du Réel, désir ardent de connaître l’Être dont nous sommes les atomes.
Deux pratiques :
1° Se baigner constamment, par le Cœur, dans l’Amour universel ; par la Pensée, dans l’Unité ; par l’Aspiration et l’élévation totale, dans le Divin pur.
Plus votre conscience s’agrandira dans l’Impersonnel, plus les vibrations du Divin la viendront impressionner et solliciter facilement. C’est le rôle de l’Amour.
2° Ayant ainsi pris le point d’appui central, s’étant adossé au rocher qu’aucune tempête ne saurait ébranler, méditer profondément, le plus souvent possible, sur toutes choses, pour reconnaître et suivre l’action de la Loi unique dans le monde sur tout ce qu’il contient : êtres, corps, âmes, esprits, événements, sensations, sentiments, aspirations, tableaux de la nature, etc., et chercher de plus en plus à reconnaître l’Harmonie universelle, se sentir pénétré par elle, étant avec tout ce qui est, vivant avec tout ce qui vit.
L’investigation intelligente est le rôle de la Raison.
S’habituer à devenir moins sensible aux vibrations qui nous affectent habituellement sur tous les plans, venues du monde extérieur, objectif, et chercher à s’éveiller aux profondeurs de notre être ; toutes les régions de l’Univers visibles ou invisibles nous traversent sans que nous en ayons conscience.
Développer notre sens interne en écoutant au-dedans de nous-mêmes, en nous efforçant.
Faire appel au Père qui est en secret au centre de tous les êtres et de nous en particulier.
Mais il faudrait parler longuement sur ces choses ; d’autre part, on n’apprend pas les mathématiques supérieures avant d’avoir appris à lire ; avant de vivre en la compagnie des grands musiciens, par l’intermédiaire d’un fidèle instrument, il faut apprendre la gamme et faire souvent des exercices désagréables même, pour goûter un jour les charmes sans mélange des suaves mélodies, des harmonies enchanteresses.
Ainsi en est-il des choses divines. Ainsi faut-il s’efforcer longuement vers la Perfection pour entendre un jour la voix douce, pour sentir la présence de ce qui est.
La Voie, c’est la pratique de l’Amour universel.
Heureux ceux qui sauront comprendre ce qui est la sainteté même !
Revue Initiations, juillet 1895.
Ndlr : AMO serait le pseudonyme de WITTE, un ingénieur de la fin du XIXème siècle qui écrivit aussi dans la revue, La Paix Universelle. (D'après Régis Ladous, Un bonheur russe, L'Âge d'homme, Lausanne, 1997.)
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