par Chappuis
Il y a une centaine d’années, un homme courageux, intrépide, faisait œuvre de pionnier, en osant, en tant que non-religieux, nous parler du Christ, de Son message et de Sa présence Vivante. C’était le premier à transmettre en dehors de toute église, même pas sur le parvis, la plénitude du message adressé à la Samaritaine. Son expérience d’occultiste lui collait à la peau et transpirait dans tous ses ouvrages, mais au-delà de ça, c’est sa rencontre avec « Le Vivant » qu’il a voulu nous conter, répétant sans cesse qu’entre lui et le Christ, il n’y avait personne, ni institution, ni pseudo-maître. Tant pis si, par peur du vide n’existant que dans leur peur, ceux qui voulurent transmettre son message, le remplirent de leur allégeance religieuse. Je ne peux que rendre hommage à la position de cet homme à la charnière d’une époque. Il s’appelait Sédir.
Aujoud’hui, Frédéric Lenoir, auteur du Christ philosophe, nous ramène à l’essentialité du message du Christ au travers de son ouvrage ; et c’est son épilogue, qui en constitue, à mon sens, le joyau autour duquel il a bâti son livre. Car en fait, c’est bien là, autour d’un puits et en compagnie d’une femme, que Jésus livre au Monde entier la quintessence de Ses paroles. N’hésitez-pas à vous replonger dans le pouvoir évocateur de Didier Decoin lorsqu’il nous parle de cette rencontre dans son livre déjà cité, Jésus le Dieu qui riait. C’est aussi cette facilité d’évocation qui nous rend perdurable la grandeur de cette rencontre.
« Le premier enseignement de Jésus à la femme samaritaine porte sur l’amour. Le deuxième sur l’intériorisation de la vie spirituelle et la liberté de conscience. Les Évangiles entendent montrer qu’amour et liberté sont les deux piliers du message que le Christ veut apporter à l’humanité. »
Pour tous ceux qui, comme elle, ont soif (ou même ont envie de rafraîchir leur soif !), je vous invite à cet épilogue, quitte à le garder pour la soif (!), à sa place, à la fin du livre.
« Où faut-il adorer Dieu ? Quelle est la religion vraie ? Cette question n’a pas pris une ride depuis deux mille ans. Je dirais même qu’elle se pose avec encore plus d’acuité dans notre monde actuel ouvert au pluralisme et à la quête spirituelle personnelle que pendant les dix-sept siècles de chrétienté où la réponse était évidente pour tous, comme elle l’est encore dans les univers religieux traditionnels. (...) La Samaritaine est éminemment moderne : elle est ouverte, elle s’interroge, elle remet en cause la tradition dont elle a hérité, elle regarde ce qui se passe ailleurs... et c’est ce qui plaît à Jésus. C’est sans doute la raison pour laquelle il a choisi cette personne – une femme, une hérétique, une sceptique – pour lui révéler l’un des aspects les plus ultimes de son enseignement. (...) La parole qu’il va lui dire est si profonde qu’elle n’a pas été entendue par l’immense majorité des chrétiens à travers l’histoire si explosive que l’institution se gardera bien de la comprendre et de la mettre en pratique.
« En une seule phrase, Jésus anéantit en effet toute prétention pour une religion – quelle qu’elle soit – à être le lieu de la vérité. (...) Jésus affirme : “Crois-moi, femme, l’heure vient où ce n’est ni sur cette montagne, ni à Jérusalem que vous adorerez le Père.” Et il ajoute aussitôt : “Mais l’heure vient – et c’est maintenant – où les véritables adorateurs adoreront le Père en esprit et en vérité.” »
Doit-on considérer qu’il faut un temps de germination aux graines ? Car, même en nous, cette puissante révélation fait son petit bonhomme de chemin, cahin-caha, même si des restes des effets secondaires des baumes religieux subsistent encore, coincés dans quelque articulation. Il m’est par contre difficile de penser que ce message « ultime » ne s’adresse pas à tous, car le Christ s’adresse, Lui, à tous. Et il est temps de le remettre à la surface, quitte à faire des vagues, signes de vie. Et comme le disait Sédir : « Il ne faut pas craindre de pousser cet axiome [ce message] jusqu’à sa dernière conséquence. »
Désormais il n’y a plus de centre religieux chargé d’une quelconque mission de sauvegarde d’un message antédiluvien, aujourd’hui, c’est-à-dire au jour où Jésus parle à cette femme, tout cela n’a plus cours. « Le message du Christ (...) relativise la religion extérieure au profit de la spiritualité intérieure. »
« Jésus (...) entend montrer que cette liberté vraie se réalise pleinement dans le lien à Dieu. Loin d’asservir l’homme, ce lien le libère. C’est évidemment incompréhensible pour un esprit moderne non religieux. Car toute notre philosophie de l’autonomie s’est justement construite en s’opposant à cette idée de dépendance à l’égard d'un ordre supérieur. »
Tout le livre ne se résume pas certes dans ces 31 pages de l’épilogue. Il convient aussi de s’en délecter dans tous ses chapitres allant d’un bref rappel de l’histoire officielle de Jésus, en passant par le chapitre évoqué par le titre même : « Jésus bouleverse toutes les règles morales en vigueur jusqu’à lui, déterminant un nouveau mode de relation entre l’homme et Dieu, mais surtout entre les hommes eux-mêmes pour fonder une nouvelle manière de vivre. (…) Les règles qu’il instaure (…) ont historiquement débordé le champ religieux du christianisme pour fonder une éthique que nous considérons aujourd’hui en Occident comme universelle et laïque : l’égalité entre tous les êtres humains, la fraternité, (…) la justice sociale, (…) la séparation des pouvoirs spirituel et temporel... »
Cet ouvrage est le bienvenu pour nous permettre de revisiter et d’actualiser tout l’essentiel contenu dans les lignes indestructibles écrites par Sédir au début du XXème siècle.
Commentaires